RWANDA - CONGO : QUAND KIGALI VEUT EFFACER SES CONTRADICTIONS
- Fungula Marguerite
- 6 févr.
- 3 min de lecture
Entre amnésie sélective et mauvaise foi, le Rwanda tisse une toile de contradictions, tentant de faire du Congo le bouc émissaire de ses tourments. Il est temps de lever le voile sur cette histoire et de confronter les vérités.
Depuis quelques semaines, un discours régulièrement dans les sorties médiatiques de certaines personnalités rwandaises : le Congo serait responsable de nombreux maux, allant jusqu’à être accusé de complicité dans le génocide rwandais pour avoir accueilli des responsables des massacres de 1994.
Il est donc nécessaire de remettre les choses en perspective et de rappeler quelques vérités historiques.
Des accusations de complicité sans fondement
Un des arguments avancés est que le Zaïre d’alors aurait été un allié de l’Occident, facilitant ainsi la fuite des génocidaires hutus. Mais avant de pointer du doigt le Congo, il serait bon de s’intéresser aux choix du Rwanda lui-même.
Un exemple frappant : Paul Kagame, ancien chef rebelle tutsi et actuel président du Rwanda, a su composer avec les puissances occidentales. Après des années de tensions entre Kigali et Paris, il a finalement accepté les explications d’Emmanuel Macron sur l’implication française dans le génocide, affirmant même que ces explications valaient plus que de simples excuses publiques. Autrement dit, lorsque cela l’arrange, Kigali est capable de pardonner aux grandes puissances, mais continue d’accabler son voisin congolais.
L’Opération Turquoise : les ombres d’un choix dicté
Autre reproche souvent entendu : l’Opération Turquoise, qui était une intervention militaire française sous mandat de l’ONU, qui a permis à des milliers de réfugiés hutus – y compris certains génocidaires – de fuir vers l’Est du Zaïre, a été perçu comme une aide envers les génocidaire qui fuyaient. Or, il faut être clair sur un point : ce n’est pas le Zaïre qui a décidé d’ouvrir ses frontières, cette situation lui a été imposée.
Mobutu Sese Seko, alors au pouvoir, avait tout fait pour ne pas s’ingérer dans le conflit rwandais. Il avait engagé un dialogue avec Kigali, affirmant que le Zaïre ne prendrait pas parti. Son unique implication était humanitaire : il s’agissait d’éviter un massacre immédiat en accueillant temporairement les réfugiés.
L’ancien président avait pris des mesures strictes pour éviter toute confusion. Il avait accepté de désarmer les militaires rwandais présents parmi les réfugiés afin d’empêcher toute activité militaire en territoire zaïrois. De plus, il n’avait jamais envisagé une installation durable de ces réfugiés à l’Est du Zaïre. Son discours était clair : l’objectif était de faciliter leur retour au Rwanda, et non de leur offrir une nouvelle terre d’accueil.
Une mémoire à géométrie variable
Ce qui est troublant, c’est que le Rwanda reproche aujourd’hui au Congo d’avoir accueilli des génocidaires en 1994, alors que ce même Rwanda collabore aujourd’hui avec certains d’entre eux pour mener des guerres dans l’Est du Congo.
Où est la logique ? Hier, on accusait le Zaïre d’avoir abrité des Hutus en fuite, aujourd’hui, ce sont Hutus et Tutsis confondus qui attaquent la RDC.
Il serait donc temps d’arrêter cette hypocrisie et de reconnaître que l’histoire ne peut pas être réécrite à sens unique. Le Rwanda ne peut pas continuer à accuser le Congo tout en fermant les yeux sur ses propres contradictions.
Au vu de l’horreur qui se déroule à l’Est du Congo, du flot incessant de vies brisées et du chaos savamment entretenu, il est aussi cynique que grave d’inverser les rôles en faisant des victimes les coupables. Le Rwanda, qui a connu dans sa chair la tragédie d’un génocide et les ravages d’une guerre fratricide, devrait être le premier à comprendre l’ampleur du traumatisme qu’il inflige aujourd’hui à son voisin. Pourtant, il joue aux pompiers et aux pyromanes, allumant l’incendie tout en accusant le Congo d’en être l’instigateur. Derrière les discours moralisateurs et les accusations fabriquées, c’est une machine bien huilée qui souffle sur les braises d’un conflit dont il se prétend pourtant le garant de la paix.
Mais l’âme du Congo ne se laisse ni modeler ni effacer. À force de vouloir travestir notre passé, de le façonner à leur convenance pour mieux nous l’imposer, ils ne font que raviver en nous la soif de vérité. Chaque tentative de falsification devient une invitation à fouiller plus loin, à exhumer nos mémoires, à interroger nos racines. Et ce chemin, nous l’emprunterons avec patience et détermination, non seulement pour comprendre notre propre histoire, mais surtout pour l’écrire nous-mêmes, avec l’encre indélébile de ceux qui refusent d’être dépossédés de leur héritage.
留言